La Liberté
Photos : Alain Wicht
Texte : Maud Tornare
Le douglas, ce résineux prometteur
Dans la forêt de Cuquerens, au-dessus de Bulle, les forestiers ont procédé hier à l’abattage d’un douglas dépérissant. Cette essence de résineux est résistante au chaud et au sec, et pousse rapidement. ©Alain Wicht
Un douglas star de la mise de bois de la Gruyère
Abattu mercredi car en fin de vie, un résineux d’Amérique sera l’une des vedettes de la sixième mise de bois de qualité et d’essences rares de la Gruyère.
MAUD TORNARE
Bulle » Il aura vécu environ 120 ans dans la forêt de Cuquerens, au-dessus de Bulle. Hier après-midi, les forestiers de la région ont procédé à l’abattage d’un douglas, un résineux prometteur sous bien des aspects. Arrivé en fin de vie, l’arbre sera l’une des vedettes de la sixième mise de bois de qualité et d’essences rares de la Gruyère qui aura lieu du 17 février au 3 mars à Echarlens. Organisée par l’association de propriétaires forestiers Forêt Gruyère, la manifestation vise à encourager la mise en valeur des bois de la région et leur utilisation locale.
Au pied du résineux plus que centenaire, Nathan Muet fait vrombir sa tronçonneuse. Après avoir procédé à l’examen de l’arbre, l’apprenti de troisième année commence à entailler le tronc sous le regard attentif de Patrick Ecoffey, responsable de la Corporation forestière Moléson. Après une bonne demi-heure de bûcheronnage, l’arbre finit par s’écrouler avec fracas dans la zone de chute préalablement sécurisée. Avant d’être abattu, le résineux a d’abord été repéré par le garde forestier de la ville de Bulle. «J’ai remarqué ce printemps qu’il dépérissait. C’est un arbre mûr, en fin de vie, qui ne va pas passer l’été. Pour garder la qualité du bois, il est important de ne pas attendre que l’arbre sèche mais de le couper encore vert», explique Amédée Andrey.
«J’ai remarqué ce printemps qu’il dépérissait»
Amédée Andrey.
Originaire d’Amérique du Nord, le douglas a été massivement planté en Suisse pour reboiser les forêts après l’ouragan Lothar. D’une hauteur de plus de 35 mètres, le spécimen bullois n’en reste pas moins rare. «Un douglas d’une qualité comme ça, il n’y en a pas beaucoup», souligne Patrick Ecoffey tout en observant les cernes sur la souche de l’arbre abattu. «On voit qu’il a poussé d’environ un centimètre par année», indique le garde forestier. Le douglas a la particularité de grandir plus rapidement que les résineux indigènes. L’arbre se révèle aussi être un allié précieux contre les effets du réchauffement climatique sur la forêt. «Contrairement à l’épicéa, le douglas résiste bien au chaud et au sec. Il est recommandé en sylviculture malgré le fait qu’il s’agisse d’une essence exotique», explique Alexandre Pipoz, chargé d’affaires chez Forêt Gruyère. Mais le résineux, dont une odeur d’agrumes émane des branches, n’est pas à l’abri de menaces. Il constitue un mets de choix pour le gibier en hiver. «Si le cerf arrive, il peut faire beaucoup de dégâts irréversibles sur les jeunes plantes», relève Patrick Ecoffey.
Pour remplacer le mélèze
Résistant aux intempéries, le bois de douglas est particulièrement adapté pour la menuiserie extérieure (façade, bardage, balcon, terrasse, etc.) et pour la charpente. Face à des essences plus cotées comme le mélèze, le résineux d’Amérique du Nord trouve gentiment sa place chez les scieurs et les professionnels des métiers du bois. «Dans la région, des entreprises commencent à utiliser le douglas en remplacement du mélèze qui est plus difficile à trouver chez nous», indique Alexandre Pipoz. «L’épicéa est aussi très recherché, mais la tendance change. Cette année, beaucoup de scieurs nous demandent du sapin blanc dont le prix est monté. C’est une aubaine pour la forêt», relève Patrick Ecoffey.
«Le douglas résiste bien au chaud et au sec. Il est recommandé en sylviculture malgré le fait qu’il s’agisse d’une essence exotique»
Alexandre Pipoz
Le douglas sera mis en vente en deux billes de 10 mètres de long chacune, pour un total d’environ 7,1 m3 de bois. Les forestiers estiment que les enchères pourraient osciller entre 200 et 250 francs le m3. «Tout dépendra de la demande», précise Alexandre Pipoz. Le verdict interviendra le vendredi 3 mars lors de l’adjudication publique des billes, au stand de tir d’Echarlens. La quantité de bois mis en vente cette année devrait être moins importante que lors de la dernière édition. La faute à la pluie en début d’hiver, qui n’a pas permis de faire du débardage avant la mi-janvier. «L’un des buts de la mise est de sensibiliser les bûcherons à trouver des beaux bois», souligne Benoît Glasson. Pour le président de Forêt Gruyère, la manifestation joue aussi un rôle social en réunissant les différents acteurs de la filière.
Exposition des billes au stand de tir à Echarlens, visite libre pour le public du samedi 18 février au dimanche 5 mars.